Après un grand format (130x170cm), je me penche sur des miniatures sur bois (24x18 cm, 21x13 cm, 15x13 cm) en suivant le même motif (d’après le Pierrot de Watteau).
Suivre un motif jusqu’à lui extirper tout ce qu’il peut m’offrir.
J’aime reprendre et prolonger: variations, déclinaisons.
Sur d’autres supports, dans d’autres formats, avec d’autres techniques, tout est remis en cause, tout se rejoue différemment et la recherche se prolonge.
Ni tout à fait semblable, ni tout à fait autre.
J’aime le minuscule du geste de la miniature; tout en délicatesse, le geste est minime mais l’attention est totale.
Une apposition méticuleuse de touches vite estompées par une brosse de quelques poils usés mais si précis.
Les gestes s’enchaînent les yeux rivés sur le support.
Je me plonge dans le PIERROT de Watteau et son personnage à l’allure embarrassée, une présence maladroite comme spectatrice involontaire d’un désastre se déroulant à notre place de spectateur.
À travers son PIERROT, je regarde la part inquiète de Watteau et la tire vers cette inquiétude qui constitue une grande part de notre modernité.
Le Pierrot, ses bras ballants, est là, simplement dans une pure présence.
Il s’offre benoîtement.
Inconscient? Impuissant?
Une inquiétude consciente, peut-être, mais sans pouvoir.
Dessous, ça se cache, ça minaude.
Les personnages sont immergés dans le végétal, disparaissant presque.
Le personnage central est vêtu d’une combinaison de protection comme un suaire qui bientôt va le recouvrir.
Cette combinaison qui anonymise est aussi portée par les activistes écologiques.
Je termine mon travail sur la transition de genre d’un de mes enfants par deux miniatures (huile sur cuivre et huile sur toile) en référence au roman ORLANDO de Virginia Woolf et au YOUNG MAN AMONG ROSES de Nicholas Hilliard, miniaturiste élisabéthain dont j’aime la mélancolie immergée dans le végétal.
Ici, je continue mon travail sur la transition de genre de l’un des mes enfants et comment son corps s'est transformé.
D’une façon plus ludique, à travers des cartes à jouer, je joue moi-même à transformer les personnages
Prendre, un peu, le Valet comme modèle, ce personnage de l’entre-deux, de la fluidité et travailler cette fluidité par ajout, couture, jeu sur les déterminants de genre.
Je ne suis, là, qu’une mère qui observe la transition de genre d’un de ses enfants.
Je ne fais que réagir avec mes moyens.
Ces travaux-ci veulent rendre compte d’un corps en cours de transformation, d’une transformation voulue.
Nous rencontrons notre environnement à partir de notre corps. Cette pelure habitée est notre interface.
Et cet interface de naissance ne correspondait pas à un de mes enfants qui a donc décidé d’en changer.
La nécessité d’exprimer plastiquement cette transformation que simplement je contemple et accompagne.
Techniques mixtes mêlant graphite et fil rouge.
Le dessin, la couture comme les sutures après la mastectomie.
De petites peintures à la gouache
ORLANDO, ceroman de Virginia Woolf qui débute au XVI° siècle et dans lequel le personnage éponyme change de genre au cours des siècles est une référence pour la transidentité et la fraise, (ce col de lingerie formé de plis) est presque devenu l’objet de mode de ralliement de la transition de genre, de la fluidité.
Tout un tas de clins d’oeil
Ces petits formats dans leur préciosité sont comme un écrin de protection.