SO WHAT? 1
Encre de chine sur papier Arches
76x56 cm
2022
Le velouté de l'encre de chine appliqué avec force et légèreté parfois jusqu'à maltraiter le papier qui résiste vaillamment.
Un noir chaud qui rappelle la photo du XIX° siècle. Sur le papier les noirs montent progressivement comme dans le développement de la photo argentique.
Et puis ce sourire qui s'affirme, qui affirme sa fragilité, son âge....
SO WHAT? 1
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LÀ, SEULEMENT
Huile sur bois
60x50 cm
2022
Deux présences dans leur représentation réaliste;
Deux présences qui se tournent le dos : un mannequin dans la « perfection » de sa silhouette opposé au corps vieilli mais réel.
Une altérité qui ne se rencontrent pas
Un regard qui se perd au-delà du regardeur, dans une douceur, une mélancolie
LÀ, SEULEMENT
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&
ESPERLUETTE
Graphite et gouache sur carnet format japonais
14x270 cm
2022
Laisser glisser le dessin dans le déploiement du carnet sur 270 cm.
Le crayon s’y exprime sans heurt sur ce papier très doux sans grain.
Dessiner dans ces intervalles, ces plis ainsi chaque personne, le carnet en main, peut recomposer son cheminement, associer à sa guise ces corps assemblé, liés.
Un jeu des frôlements, d’enchevêtrements scandé par l’enroulement d’un ruban de méandres dorés comme ce signe de liaison qu’est l’esperluette.
ENCOIGNURE
Huile sur toile
180x80 cm
2022
"[…] ces patientes appropriations d’un coin de rue, d’un trottoir, et ces vies dissolues dans le mouvement et le passage. " Philippe Vasset Un livre blanc
Une figure empruntée dans ses membres, trop anguleux, trop grands, trop déployés : un corps comme chantourné.
Dans l’ombre, dans une encoignure, une discrétion …
Ces vies qui sont au monde, dans le monde, dans la presse mais dans une existence niée…. en rendre compte par la peinture, une peinture humaniste
ENCOIGNURE
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FIGURE SACCAGÉE
Huile sur bois
50x30 cm
2021
Être face au miroir, non pour un autoportrait mais pour incarner un personnage comme un acteur endosse un rôle.
Être autre que soi, prendre la pose et l’expression; contracter le visage pour dire l’inquiétude d’être au monde, face au monde.
À travers un seul et unique visage, atteindre un visage universel, une humanité commune.
Simplement retranscrire une humanité par ce visage modelé et patiné par le temps.
FIGURE SACCAGÉE
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"Grand, le talent de la douleur : dans des situations malheureuses, on invente. Elle ruse, elle équipe un métier barbare d’une toile et tisse à fils blancs ses souvenirs rouges. Révélations du crime."
SOUVENIRS ROUGES
7 feuillets reliés/cousus en un livret de 21x95 cm présenté dans un coffret.
Broderie sur tissu et papier, dessins aux crayons de couleurs, au stylo Bic rouge, travail à la machine à coudre, texte tapuscrit.
Papier japonais en coton et BFK Rives
2021
Souffle coupé, mutisme infligé, exaction révélée
Travailler le mythe de Procné et Philomèle (Ovide, Les Métamorphoses Livre VI) en parallèle, en rappel des mouvements actuels et éternels de #MeToo
Parce que là, déjà, tout est dit, que ce soit dans les mythes, les tragédies, les légendes ; ces textes nous racontent, nous avertissent de la violence, de toutes les violences entre humains et plus particulièrement de celles exercées par les hommes envers les femmes.
La Métamorphose décrite par Ovide autour de Philomèle et Procné raconte l’histoire d’un viol, d’une mutilation, d’un enfermement mais c’est aussi l’histoire d’une reconquête de la parole ou tout au moins du récit. Une femme sort de son statut de victime, s’émancipe du mutisme infligé par son inventivité : ne pouvant parler, elle tisse ; le langage devient image et témoigne.
Je reprends là, cette Métamorphose (VI,412-674) autour d’un livre objet mêlant dessins et broderies sur un carnet de 21x95 cm. En 2009, j’avais déjà travaillé cette histoire de Philomèle et Procné dans une installation (https://www.agnesmariller.com/article-36209781.html)
SOUVENIRS ROUGES
Les feuillets
Le récit
Deux soeurs, deux princesses athéniennes : Philomèle et Procné.
Procné est mariée à un roi Thrace, Térée qui l’emmène au loin, dans son pays. Mais elle se languit de Philomèle et demande à son mari d’aller chercher celle-ci. Ce qu’il fait.
Sur le chemin de retour
« J’ai gagné! s’exclame Térée ; avec moi l’objet de mon désir. » Il bondit, à peine peut-il retarder sa jouissance, le barbare, jamais son oeil ne se détourne […]
Térée viole sa belle soeur, Philomèle
; il l’enferme. Il avoue sa barbarie. Une vierge, une femme seule, il la viole.
« Je n’aurai plus honte, je dirai tes actes. Si je peux je viendrai devant le peuple. Enferme-moi dans les forêts et je remplirai les forêts, je toucherai les rochers, ils sauront. L’air m’entendra, le dieu aussi-s’il y en a, dans l’air. »
Révoltée, elle crie le nom de son père, lutte pour parler : à la pince il lui saisit la langue, la tranche de son épée sauvage. Une petite racine de langue sautille. Elle s’écroule et tremblante murmure contre la terre noire. Comme une queue de couleuvre mutilée saute encore, palpite, en mourant cherchant les traces de sa maîtresse.
À leur arrivée, lui ayant coupé la langue afin qu’elle ne puisse témoigner et l’enferme dans une bergerie.
Privée de parole, Philomèle tissera son histoire pour la faire connaître
Grand, le talent de la douleur : dans des situations malheureuses, on invente. Elle ruse, elle équipe un métier barbare d’une toile et tisse à fils blancs ses souvenirs rouges. Révélations du crime.
Je n’aurai plus honte, je dirai tes actes.
Traduction de Marie Cosnay